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Nawak-isme
17 octobre 2012

Tic tac tic tac...

macadamQuand en 1839, on inaugure la première gare à Bruxelles à l’emplacement de l’ancien cloître du couvent des Bogards, mes ancêtres ont été entraînés sans le vouloir dans l'ère vraiment moderne : celle de la vitesse et du stress.
A cette époque, pour se déplacer, on utilise principalement encore le cheval qui au trot parcourt 15 kilomètres en une heure. Avec le train, on double cette vitesse. Et pour contrôler le temps qu'on veut à présent "battre", pendant les décennies qui suivent, les montres  de poche (de gousset) se popularise... et tout s'accélère. Mes ancêtres auraient dû continuer à marcher à la vitesse de 4 km/h sans vouloir se chronométrer...
Milieu du XIXème siècle tout accélère donc, et, 150 ans plus tard, on se demande encore si l'homme a intégré cette accélération. Mais bon...

Imaginez votre patron vous demandant une "petite étude statistique". Afin de récolter les chiffres nécessaires, vous rentrez chez vous faire votre petit paquetage (de quoi vous changer pendant une semaine au bas mot), vous vous dirigez en accélérant légèrement le pas et vous montez dans le train (vous avez de la chance, car votre patron ne regarde pas à la dépense en vous faisant emprunter ce nouveau mode de transport, mais avec la malle de la poste cela aurait mis deux fois plus de temps). Arrivé à destination, vous cherchez un logement, vous déposez votre sac de voyage et vous allez visiter la succursale du coin. Vous avez de la chance: Marcel le comptable est là et peut vous aider à collationner les chiffres souhaités. Naturellement, vous allez avec lui vérifier les données dans l'entrepôt / en champs / dans les coffres... et vous rentrez à l'hôtel avec Marcel pour fêter ça, avant d'aller vous coucher tôt, car le lendemain, vous allez visiter Isidore dans la prochaine succursale... Bref, une fois toutes ces données récoltées, vérifiées et ramenées à la Capitale, dans votre petit bureau à la lueur du bec de gaz vous calculez ces fameuses statistiques, vous tracez une belle courbe sur du beau papier millimétré, et vous pouvez présenter ce beau rapport à votre patron accompagné d'un commentaire circonstancié le lendemain (car les vrais patrons quittent le bureau pour le club en fin d'après-midi). Ben oui, vous pouvez bien le commenter ce rapport : vous avez tout vu et eu le temps de tout vérifier. Au fait, Isidore sera bientôt papa; il serait bon de lui envoyer le petit cadeau habituel (un chèque-cadeau à faire valoir l'Innovation de sa ville).

De nos jours, vous, pauvre plouc, allez découvrir dans votre beau planning (ha oui, on ne vous a pas prévenu que les trains ne sont plus les seuls à avoir un planning à respecter, et que vous aussi devez entrer en gare à l'heure dite)... donc vous découvrez dans votre planning, sans avoir le souvenir de l'y avoir ajouté une nouvelle échéance pour dans deux heures concernant les "stat" de l'ensemble des succursales au niveau mondial. Ne songez même pas un instant à vous payer un tour du Monde au frais de la boîte : ces chiffres sont supposés être disponibles (pas besoin de les vérifier, n'est-ce pas?) et, c'est bien connu, il vous suffit d'un clic pour obtenir des statistiques et de beaux graphiques. Les deux heures prévues sur le planning c'est en fait pour vous permettre de broder un petit texte autour des chiffres et des graphiques, que personne ne lira (plus le temps de lire, le graphique parlera de lui-même).

Qui se soucie de la validité des chiffres et de leur interprétation? Et qui se soucie de vous offrir un petit voyage d'une semaine en province?... Dans une heure, une autre demande tout aussi urgente sera déposée sur votre bureau virtuel; alors... ne pensez pas, courez!

Tic tac tic tac... Mais avec le temps, seule la montre s'est faite plus fiable; pas le train, pas le patron, pas les stat, et vous non plus ^^

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